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Derniers jours de l’exposition “The lives of women” de la photographe Mary Ellen Mark à la Maison Doisneau

Shavanaas Begum avec sa fille de trois ans, Parveen, Apollo Circus, Goa, Inde, 1989 © Mary Ellen Mark

Ne manquez pas les derniers jours de l’exposition “The lives of women” de la photographe Mary Ellen Mark à la Maison Doisneau, vous avez jusqu’au 14 août.

Mary Ellen Mark (Philadelphia, 1940 – New York, 2015) est probablement l’une des photographes les plus étonnantes et les plus singulières du XXe siècle. Cela est probablement dû à sa capacité infaillible à faire face à la réalité du monde, une réalité crue, à l’état brut, douloureuse souvent et dont il est parfois difficile de soutenir le regard. Elle s’y tient au plus près à force de la regarder et elle ne démord pas, tenace. Elle l’apprivoise avec le temps et s’entretient avec elle, le temps de la dévoiler sans y paraître. Mary Ellen Mark se penche sur les marges du monde à force de l’habiter, comme Eugène Atget se penchait sur les zoniers des faubourgs de Paris et les vagabonds du Port-Royal au tournant du siècle.

Amanda et sa cousine Amy, Valdese, Caroline du Nord, États-Unis, 1990 © Mary Ellen Mark

Elle regarde cette société peuplée d’infâmes, ceux qui, comme le dit Michel Foucault, ne sont pas la manifestation d’un excès de mal mais bien ceux qui de par leur condition ne s’inscrivent pas dans une hiérarchie sociale, régie et imposée dès la Rome antique par le Censor. L’infâme est celui que l’on ne regarde pas. Il n’est qu’une ombre transparente qui hante les souterrains du monde comme les condamnés à mort de la société. Tout au long de sa carrière, Mary Ellen Mark sondera l’envers du visible. Elle tournera sans cesse son regard vers le visage noir de l’Amérique. Elle traquera en silence dans les tréfonds du monde ce que Pierre Mac-Orlan nomme le “fantastique social”, cette espèce de forme à la fois étrange et monstrueuse que seule la photographie, cet “art solaire au service de la nuit” peut capturer. Mary Ellen Mark sait où la trouver ; elle grimpe parfois sur les visages des pauvres, se cache dans le regard des prostitués, des travestis, des drogués. Elle est là, tapie dans l’ombre de l’enfer, où gisent des groupes néo-nazis ou les forces occultes du Ku-Klux-Klan. Ce fantastique social s’avance, parfois grotesque, parfois monstrueux, et ne se laisse voir qu’à ceux qui savent de son existence. Mary Ellen Mark sait l’attendre. Elle guette la détonation que provoque sa morsure et consigne ce déchirement du réel dans un fragment d’éternité.

Fillette sautant par-dessus un mur, Central Park, Manhattan, New York, États-Unis, 1967 © Mary Ellen Mark

L’exposition présentée réunit des images éparses qui procèdent d’une sélection exhaustive effectuée par la photographe elle-même au début des années deux-mille alors qu’elle avait entrepris de mettre de l’ordre dans ses archives. Ces images font écho aux séries les plus emblématiques de son travail et ont fait souvent l’objet de nombreuses publications dans les magazines les plus importants tels que Times, Life ou Vanity Fair. Elles ponctuent sa trajectoire et s’inscrivent aujourd’hui dans l’Histoire parce qu’elles sont devenues des icônes de notre culture visuelle : Ward 81, Indian Circus, Streetwise, la Famille Damn, Twins. Elles disent cette carrière fulgurante, exemplaire et surtout cet engagement irrévocable qui fût le sien à travers la figure récurrente qui traverse l’œuvre entière de Mary Ellen Mark, celui de la femme dont elle s’était faite porte-parole. Elle laisse ici un témoignage poignant sur l’Histoire de l’Humanité, un document qui parle d’un passé auquel il convient de mettre un terme.

Anne Morin / Commissaire

[Source : communiqué de presse]

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